Edoardo Stoppioni – Le droit des investissements à l’épreuve de la guerre

Edoardo Stoppioni
Professeur de droit public, Université de Strasbourg

Résumé : Cet article présente une analyse critique des rapports entre le droit international des investissements et la guerre, soutenant que les interactions anciennes entre ces deux domaines ont largement forgé la manière de fonctionner du premier. Cela s’explique tout d’abord par un certain lien génétique qui les unit dans l’histoire coloniale. Ce lien génétique explique d’ailleurs certaines continuités dans la manière dont l’arbitrage d’investissement mobilise les textes pertinents aujourd’hui, ainsi que la manière dont il reconstruit en son sein une vision tout à fait particulière de la guerre.

La question des interactions entre le droit international des investissements et les conflits armés a été à l’origine d’une littérature abondante mais elle reste fondamentale. Les approches classiques du droit international y voient une question d’articulation et comparaison entre deux branches spécialisées, de relations entre deux sortes de lex specialis1. Il est en effet indéniable que, dans leur morphologie actuelle, les deux branches se croisent de plusieurs manières. Le droit des investissements parle de conflits armés (il suffit de penser aux clauses spécifiques des TBI dédiées à ces questions), tout comme le droit des conflits armés parle de propriété privée y compris étrangère (comme le montre l’article 53 des Conventions de La Haye de 19072 ou l’article 38 du Code Lieber de 18633). De plus, ce type de discussion portant sur les interactions entre les deux corps de normes s’intensifie au lendemain d’évènements marquants comme les printemps arabes ou, plus récemment, l’agression russe en Ukraine.

Cependant, le risque de cette approche classique est de banaliser la charge axiologique de cette interaction particulière et de la réduire à une question d’articulation normative anodine. Pour cette raison, les théories critiques mettent l’accent sur la manière dont le droit international des investissements est né de la guerre et incitent à prendre au sérieux ses origines coloniales et la manière dont celles-ci ont un impact sur son fonctionnement actuel4.

L’objectif de cet article sera donc de présenter les manières dont le lien entre le droit international des investissements et la guerre influence la manière de fonctionner du premier. Il sera donc nécessaire de s’intéresser tout d’abord au lien génétique qui les unit dans l’histoire coloniale (I), pour prolonger cette réflexion relativement aux liens systémiques existant entre droit des investissements et conflits armés aujourd’hui (II). Cela nous permettra enfin de comprendre la manière dont l’arbitrage d’investissement reconstruit en son sein une vision tout à fait particulière de la guerre (III).

I. Les liens génétiques entre le droit international des investissements et la guerre

Les travaux sur les origines coloniales du droit international des investissements sont bien connus5. Kenneth Vandevelde a notamment pu distinguer une phase coloniale (et post-coloniale), d’où est né ce que l’on appelle le standard minimum de traitement des étrangers, ainsi qu’une phase globale, marquée du sceau de la floraison conventionnelle de TBI et qui reste liée à la phase précédente par l’articulation de ces traités avec la coutume6. La première est historiquement marquée par des contextes de guerre qui ont coloré la naissance du droit international des investissements (A) et qui continuent d’influencer la pratique contemporaine de l’arbitrage (B).

A) Guerre et origines coloniales du droit international des investissements

Dans un magnifique article de 2009, James Thuo Gathii a proposé de penser la manière dont la guerre a été à l’origine même et a permis de consolider les structures du droit international des investissements moderne7. La clause Calvo et la doctrine Drago sont en effet le résultat de la pratique des États européens qui, au xixe siècle, entreprennent des agressions et des attaques militaires à l’égard des États latino-américains, économiquement faibles, afin de recouvrer les dettes dues à leurs citoyens. Un cas emblématique consiste dans le blocus organisé par la Grande-Bretagne, l’Allemagne et l’Italie au Venezuela en 1902 : en proie aux révoltes internes, le gouvernement vénézuélien refuse de régler par la voie diplomatique le litige issu du non-paiement des bons du Trésor détenus par des citoyens de ces États et propose de soumettre les litiges à une Commission spéciale composée par des juristes vénézuéliens, situation que les États européens décident de débloquer par le recours à la force8.

À partir de ce type de configuration, le secrétaire des affaires étrangères vénézuélien, Luis M. Drago, va théoriser sa doctrine consistant à proscrire le recours à des moyens militaires pour recouvrer des dettes9. Carlos Calvo va problématiser le caractère asymétrique d’un droit international qui crée des avantages procéduraux seulement pour les investisseurs étrangers, en les faisant échapper par le biais de la protection diplomatique à l’action des juges nationaux et donc à l’emprise de l’ordre juridique de l’État d’accueil. Ce droit international est donc vu comme un outil problématique pour la souveraineté des jeunes États latino-américains : les clauses Calvo sont pensées comme des outils pour limiter cette protection internationale des étrangers, perçue comme un instrument d’oppression des États puissants à l’encontre des États faibles10.

Dans le prolongement de cette approche doctrinale, plus récemment Kathryn Greenman a publié un ouvrage critique portant sur l’action des Commissions mixtes instituées à ce moment précis de l’histoire11. Cet ouvrage se concentre justement sur les Commissions créées à l’occasion de mouvements révolutionnaires intervenus au lendemain de l’indépendance du Mexique (1839, 1840 et 1868), du blocus vénézuélien de 1902 ainsi que de la révolution mexicaine de 1920, en mettant en avant un contexte politique hautement complexe. Ces jeunes États, gangrénés par des luttes internes et une profonde fragilité économique, craignent au plus haut point les risques d’une recolonisation face aux interventions européennes et américaines au Mexique et au Venezuela, formellement motivées par des réclamations dues aux dommages subis par leurs nationaux aux mains de rebelles, mais pouvant être vues comme une manière de s’assurer la perpétuation de l’accès aux marchés mexicain et vénézuélien et à leurs ressources naturelles après la fin des relations coloniales stricto sensu12.

Kathryn Greenman met en exergue deux grandes thématiques qui montrent le projet caché derrière ces instruments. Un premier exemple parlant consiste dans l’affirmation par ces commissions de leur compétence juridictionnelle relativement aux réclamations contractuelles. Alors que les instruments conventionnels étaient silencieux ou obscurs à cet égard13, les commissions viennent progressivement rajouter ce fondement de compétence à côté de celui relatif aux réclamations basées sur les préjudices corporels ou à la propriété, ce qui leur permet de créer l’image de conditions propices « that enabled foreign trade and later investment to penetrate Latin America » et « reduced the risk of doing business overseas »14. Le deuxième exemple consiste dans les débats intenses qui ont porté sur le contenu du standard minimum de protection des étrangers. L’opposition classique confrontait la thèse latino-américaine, notamment prônée par Carlos Calvo défendant qu’il s’agissait là d’une question interne et devant être régie par le droit national, à la thèse anglo-américaine consistant à soutenir la formation d’un standard international coutumier. Greenman démontre ainsi que ce dernier standard est progressivement façonné à partir du renversement du principe d’absence de responsabilité pour manquement de l’État à la protection de l’étranger face aux rebelles, dont l’effacement provoque des contraintes majeures pour les jeunes États issus de la décolonisation15.

B) AAPL et la perpétuation du lien avec la guerre dans la pratique moderne

Comme le soulignait James Gathii, une telle analyse historique permet de penser la perpétuation de ces logiques coloniales dans la pratique moderne: « the move toward arbitration and away from the use of force to enforce contract debts shifted the concerns of weak, mostly non-Western countries from the fear of forcible interventions to the bias against them in the rules, processes, and outcomes of arbitral forums »16. En effet, la pratique des commissions mixtes est au cœur du raisonnement sur le fond dans celle que l’on considère généralement comme la première des grandes affaires CIRDI, AAPL c. Sri Lanka17. Il faut souligner que l’affaire AAPL, généralement célébrée exclusivement pour avoir donné l’impulsion fondamentale aux arbitrages fondés sur les traités bilatéraux d’investissements (en instaurant l’idée d’arbitration without privity18), était une affaire portant sur la responsabilité de l’État pour dommages de guerre. La Asian Agricultural Products Ltd était une compagnie britannique qui investissait dans la société publique sri-lankaise Serendib Seafood Ltd, bénéficiant d’une consistante participation gouvernementale et active dans le marché de la crevette. Lors de mouvements de révolte, les milices sri-lankaises, réagissant contre les insurrections des combattants tamil, causent d’importants dommages à une installation de production de crevettes, raison qui pousse l’investisseur à saisir un tribunal CIRDI. Le fondement au support de la requête est la clause du TBI relative aux dommages de guerre (ouvrant droit à réparation pour tout préjudice « owing to war or other armed conflict, revolution, a state of national emergency, revolt, insurrection or riot in the territory »19), l’investisseur soutenant que les standards conventionnels auraient entraîné une « strict or absolute liability » de l’État20. En revanche, le Sri Lanka soutenait que sa responsabilité se limitait à un standard de diligence due et que, pour engager sa responsabilité, encore eût-il fallu pouvoir démontrer que l’État avait été « negligent in the use of or in the failure to use, the forces at its disposal for the prevention or suppression of the insurrection »21.

Le tribunal va faire œuvre de reconstruction du droit international coutumier en étudiant la pratique des commissions mixtes et la doctrine, pour se focaliser sur l’obligation de diligence due en cas de situation de guerre ou révolte (en mettant en avant le « duty to protect » par tous les « means reasonably necessary », dégagée dans la jurisprudence ancienne). Les deux parties concordaient sur le fait que la zone où se situait l’entreprise avait été infiltrée par les combattants tamil et était restée hors contrôle des autorités sri-lankaises pendant plusieurs mois avant la destruction22. Ainsi, le tribunal en déduit que la responsabilité de l’État était engagée: « failure to resort to such precautionary measures acquires more significance when taking into consideration that such measures fall within the normal exercise of governmental inherent powers—as a public authority—entitled to order undesirable persons out from security sensitive areas »23.

James Gathii souligne l’effet systémique que va avoir l’affaire AAPL, impulsant un rehaussement progressif des obligations des États en cas de guerre ou de révolte et sacralisant les droits des investisseurs à réparation dans ce contexte. La sentence parviendrait progressivement à se rapprocher de ce standard de strict liability qu’invoquait l’investisseur24. De plus, à son avis, cette posture qui va prospérer dans l’arbitrage d’investissement n’est pas entièrement reflétée dans le contentieux interétatique, la CIJ ayant clarifié que le standard de diligence due doit être interprété à la lumière du contexte25.

II. Les liens systémiques entre droit international des investissements et droit de la guerre

En observant la pratique de l’arbitrage d’investissement, on voit que l’essentiel de ces relations se traduit dans le contentieux de la protection pleine et entière (A), ou alors dans des clauses spécifiquement dédiées aux conflits armés dans les TBI qui restent cependant rares (B). La défense de l’État se concentre sur l’invocation de clauses ou outils d’exception (C), alors que la question des effets du conflit sur le TBI lui-même occupe peu les arbitres et la doctrine, qui postulent une présomption forte de continuité (D).

A) La protection pleine et entière

La principale clause de protection substantielle invoquée par un investisseur confronté à des dommages de guerre est la protection pleine et entière. Les origines historiques de cette disposition sont généralement liées aux clauses garantissant la sécurité des commerçants en cas de mouvements de révolte ou de guerre, insérées dans les traités anglais dès le xviie siècle et proliférant dans les traités commerciaux conclus par les États-Unis au xviiie siècle26. Leur maintien dans la pratique américaine du post-Seconde Guerre mondiale leur donne une grande visibilité et détermine leur multiplication dans différents TBI27.

Comme on l’a déjà montré, le contentieux classique s’est intéressé de très longue date aux dommages subis par les étrangers en période de désordre intense. Les Commissions mixtes réglaient ce type de questions épineuses en se concentrant sur le libellé de la clause de protection et le standard de protection qui y était prévu28. Par la suite, le contentieux mixte va identifier comme point de départ intellectuel l’arrêt de la CIJ dans l’affaire Elettronica Sicula de 198929. Dans cette affaire où les États-Unis agissent au titre de la protection diplomatique, il était question de l’application de l’article V du traité d’amitié, commerce et navigation de 1948 liant États-Unis et Italie et prévoyant une obligation de garantir aux ressortissants de chaque partie « la protection et de la sécurité les plus constantes pour leurs personnes et leurs biens »30. Les États-Unis considèrent qu’une violation de cette disposition a été commise lorsque l’Italie a permis aux ouvriers de l’Elettronica sicula d’occuper l’usine de l’investisseur, ce qui aurait causé une détérioration des locaux ainsi qu’entravé les efforts du syndic de faillite dans la cession de l’usine31. Une Chambre de la Cour affirme qu’« il n’est pas possible de voir dans l’octroi “de la protection et de la sécurité […] constantes” prévu à l’article V la garantie qu’un bien ne sera jamais, en quelque circonstance que ce soit, l’objet d’une occupation ou de troubles de jouissance. On ne pouvait pas raisonnablement s’attendre à ce que le licenciement de quelque huit cents salariés passe sans protestations »32. La décision insiste donc sur le fait que ce type de clause prévoit une obligation de diligence, dans le sens de prendre des mesures de protection nécessaires, mais rappelle que la sécurité dont il est question ne revêt pas un sens absolu33 et que le standard minimum coutumier en la matière est un plancher de base sur lequel les traités peuvent venir construire un standard de protection plus étoffé34.

À partir de cette base, le contentieux mixte montre une tendance à étendre le champ d’application et les effets de la clause. Cet effet d’expansion de la clause est double. D’une part, on assiste à une expansion ratione personae : la clause de protection pleine et entière joue comme protection à l’encontre des actes des organes étatiques35 mais aussi de ceux provenant d’acteurs non étatiques36. Dans un cas comme dans l’autre, le cœur de l’analyse est l’obligation de diligence due. Dans le cas de violence étatique, l’affaire ATM constate une violation de l’obligation de prendre les mesures nécessaires37, au lieu de raisonner en termes d’attribution38. D’autre part, on assiste à une expansion ratione materiae : en effet, plusieurs tribunaux rajoutent à côté de la protection de la sécurité matérielle de l’investissement une exigence de protection « juridique », en soutenant que la protection s’étend à la sécurité juridique et donc à un ordre juridique qui présente des qualités particulières de stabilité39. Cette tendance est loin d’être unanime et une grande partie des tribunaux refuse cet élargissement qui reviendrait à confondre la sécurité pleine et entière avec le traitement juste et équitable, selon la célèbre clarification fournie par le tribunal dans la sentence Suez40.

B) Les clauses spécifiques des traités bilatéraux d’investissement concernant les conflits armés

À côté de l’emploi de clauses générales du TBI pour obtenir la protection de l’investissement dans un contexte de guerre, il existe des clauses spécifiques dans ces traités portant sur les conflits armés41. Par exemple, dans le TBI France-Libye de 2004, l’article 5(3) concernant l’expropriation et l’indemnisation prévoit que « les nationaux ou sociétés de l’une des Parties contractantes dont les investissements auront subi des pertes dues à la guerre ou à tout autre conflit armé, révolution, état d’urgence national ou révolte survenu sur le territoire de l’autre Partie contractante, bénéficieront, de la part de cette dernière, d’un traitement non moins favorable que celui accordé à ses propres nationaux ou sociétés ou à des nationaux ou sociétés de tout autre État tiers ». Comme il a été souligné, ce type de clause ne crée aucun droit substantiel en dehors de celui de ne pas être discriminé dans l’indemnisation des préjudices subis par rapport aux nationaux de l’État du for où à des investisseurs d’États tiers42. Ainsi, le tribunal dans l’affaire CMS c. Argentine a pu considérer que ce genre de clause ne prévoit qu’un « floor treatment for the investor in the context of the measures adopted in respect of the losses suffered in the emergency »43.

Certains TBI prévoient une forme étendue de clause. Au sein de ce type de clause, après le principe de non-discrimination précédemment indiqué, nous trouvons une partie supplémentaire prévoyant un fondement de réparation particulier :


In the event that such damages result from : (a) a requisitioning of property by the other Party’s forces or authorities, or (b) destruction of property by the other Party’s forces or authorities which was not caused in combat action, the national or company shall be accorded restitution or compensation in accordance with Article III.44

Les deux principales affaires où ce type de clause a été interprété ont toutefois montré une exigence centrale pour obtenir réparation : les dommages doivent être causés directement par les forces de l’État hôte et non par de simples mouvements de révolte. Comme le montre l’affaire AMT c. Zaïre, la charge de la preuve est importante sur ce point, car le fait que le dommage soit causé par des militaires en uniforme n’est pas suffisant45.

Il convient de souligner cependant que les affaires portant sur ces clauses restent minoritaires. Le fait que les arbitres n’aient par ailleurs pas souligné la différence structurelle entre les deux configurations contentieuses a mené à une certaine banalisation du contexte de guerre dans l’arbitrage.

C) L’exception sécuritaire et les conflits armés

Il faut d’ailleurs se poser la question de savoir dans quelle mesure la situation de conflit armé peut jouer en tant qu’exception aux règles de protection. Il existe pour cela deux grandes options. Nous trouvons dans certains TBI des clauses d’exception sécuritaire, comme cela est notamment le cas dans les TBI américains. Ces clauses apparaissent dans la pratique conventionnelle en tant que résultat des anxiétés américaines dans le contexte de la guerre froide et à l’encontre de l’idéologie communiste. Il est d’ailleurs intéressant de souligner que ces anxiétés caractérisent aussi bien la pratique des États-Unis à l’égard de Conventions de Genève (incitant à la rédaction permissive des règles de droit international humanitaire46) que des traités de droit international économique47. Le but de ces clauses est de permettre une distribution des risques, en faisant peser sur l’investisseur les coûts d’avoir investi dans un contexte où se produisent des circonstances exceptionnelles48. Comme l’a précisé le Comité ad hoc dans l’affaire CMS, la clause d’exception « if and for so long as it applied, excluded the operation of the substantive provisions of the BIT »49. Et selon la doctrine classique, « the conditions for the application of such a security exception are relatively easily met in a situation involving armed force »50.

Autrement, il reste les circonstances excluant l’illicéité provenant du droit général de la responsabilité. L’ancien contentieux des commissions mixtes latino-américaines avait été fortement mobilisé concernant l’application de ces circonstances excluant l’illicéité, et la force majeure plus particulièrement, en cas de désordres internes51. À cela s’oppose un contentieux contemporain bien plus réservé sur leur application. Dans une affaire particulièrement connue, Autopista c. Venezuela, l’investisseur invoquait qu’il ne pouvait pas se prévaloir des dispositions de l’accord de concession qui lui permettaient d’augmenter le prix du péage d’un tronçon d’autoroute qu’il gérait, en raison de mouvements de révolte de la population civile. Le Venezuela invoque la force majeure, mais le tribunal – après avoir rappelé les conditions d’impossibilité d’exécution, imprévisibilité et extériorité – considère que les faits étaient bien prévisibles et que l’État aurait dû agir en conséquence52. De même, le contentieux argentin a montré la rigueur des arbitres à l’égard de ce deuxième cas d’exception non écrite, notamment en matière d’état de nécessité. La défense fondée sur le droit général de la responsabilité n’est donc pas des plus prospères dans l’histoire de l’arbitrage d’investissement.

D) L’impact du conflit armé sur le TBI

L’impact des conflits armés sur les traités a été considéré comme l’un des aspects les plus controversés du droit international, les règles en la matière étant pour le moins « incomplete and confused »53. L’approche traditionnelle, majoritaire en doctrine jusqu’au xixe siècle, consistait à dire que toutes les relations juridiques entre les belligérants cessaient avec la guerre, ce qui impliquait une terminaison automatique des traités liant les parties au conflit54. Au xxe siècle, l’approche inverse prévaut, les exigences de sécurité juridique incitaient à opter pour une solution préservant les traités liant les parties à un conflit : c’est un principe de continuité qui s’impose55. La Commission du droit international va s’intéresser à la question à partir de 2004, avec les travaux du rapporteur spécial Ian Brownlie, puis à compter de 2009 de Lucius Caflisch, qui va finalement proposer un projet d’articles en 2011. L’article 3 de ces articles réaffirme le principe général selon lequel « l’existence d’un conflit armé n’entraîne pas ipso facto l’extinction des traités ni la suspension de leur application ». Ainsi, il faudra d’abord procéder à une approche subjective et vérifier dans le traité les « dispositions portant sur son application dans des situations de conflit armé » (article 4) ; à défaut c’est une approche objective qui s’impose eu égard à la nature du traité et aux caractéristiques du conflit (article 6) ainsi qu’à la matière dans laquelle intervient le traité (article 7)56. Il convient enfin de souligner que, en vertu du principe de divisibilité, l’impact du conflit armé emporte l’ensemble du traité à moins qu’il ne soit possible de séparer différentes parties de celui-ci et de leur accorder un sort différent (article 11). Le projet d’articles inclut en annexe une « liste indicative des traités visés à l’article 7 », incluant en son point (e) les « traités d’amitié, de commerce et de navigation et les accords concernant des droits privés ». Le commentaire des articles par la Commission précise que les TBI sont inclus dans cette mention57. Comme il l’a été souligné par la doctrine qui s’est intéressée de près au sujet58, la plupart des auteurs ont tendance à défendre un principe fort de continuité des TBI en cas de conflit armé, en se fondant sur la liste annexe de l’article 7 ou encore sur l’existence de clauses spécifiquement liées à la guerre dans certains TBI59.

III. Une certaine vision de la guerre dans le monde de l’arbitrage d’investissement

Le monde de l’arbitrage d’investissement construit un discours très positif relativement à son rôle dans le contexte de guerre (A). Mais on peut observer à quel point cette optique se traduit en un prisme déformant (B).

A) La glorification des vertus de l’arbitrage d’investissement dans les contextes de guerre

Le monde des affaires voit dans l’investissement direct étranger un outil fondamental et nécessaire pour reconstruire un pays frappé par la guerre. C’est ce qu’attestent les initiatives ukrainiennes d’encouragement des investissements étrangers60. De manière similaire, le ministère de la justice ukrainien est en train de prôner deux initiatives finalisées à la reconstruction du pays et fondées sur la mise en place de juridictions internationales : une première consiste en un tribunal international pour juge des actes d’agression russes et la seconde consiste en la mise en place de Commissions mixtes pour organiser les réparations de guerre. Ces projets sont encouragés par plusieurs experts, comme Chiara Giorgetti qui se fonde sur l’expérience de la Commission mixte Érythrée-Éthiopie pour soutenir l’efficacité de ce type d’arbitrage pour la réparation dans les contextes post-guerres61.

En revanche, il ne faut pas sous-estimer la manière dont l’arbitrage d’investissement peut se saisir de manière particulière de ce genre de contexte. On voit bien en effet que la guerre est ici conçue comme une occasion génératrice de contentieux. Les évènements liés aux printemps arabes et notamment l’histoire récente de la Lybie ont renforcé l’attention du milieu de l’arbitrage d’investissement à l’égard des conflits armés, comme en attesta la multiplication de publications doctrinales à ce sujet au lendemain des évènements. Comme il a été souligné62, lorsqu’en 2011, les révoltes contre le régime de Kadafi se sont transformées en un conflit armé appuyé par les bombardements de l’OTAN, différents cabinets d’avocats spécialisés en arbitrage d’investissement ont commencé à faire circuler des newletters pour informer leurs clients implantés en Libye des possibilités de réparation issues du droit international des investissements63. La même configuration se réalise lors de l’agression russe en Ukraine et le message est clair64.

B) Le prisme déformant de la protection de l’investissement

Comme la guerre est pensée au sein du milieu de l’arbitrage comme une occasion à saisir pour construire des contentieux de protection de l’investissement, il convient de se demander si le droit international des investissements ne risque pas de l’aborder sous un prisme déformant. Dans une certaine mesure, ce prisme est lié à la logique de fragmentation : « investment protection arbitrator will inevitably approach problems with an investment protection focus »65.

Mais la complexité de ce prisme déformant est évidente dans le cadre du contentieux relatif à la Crimée. En effet, avec l’annexion russe de la Crimée en 2014, un contentieux important avait été monté. Les faits relatifs à la Crimée ont entraîné deux grandes séries d’arbitrages d’investissement. Le premier groupe consiste en une série d’arbitrages lancés contre la Russie par des sociétés privées rattachées à Igor Kolomoisky, entrepreneur ukrainien et ancien gouverneur de la région de Dnipropetrovsk qui s’était fortement opposé à l’intervention russe en Crimée et au Donbass (il s’agit des affaires Belbek66, Privatbank67, Ukrnafta68, Stabil69, Lugzor70 et Everest71). L’autre série d’arbitrages a été impulsée par des sociétés d’État ukrainiennes (il s’agit des arbitrages Oshchadbank72, Naftogaz73 et Ukrenergo74).

La stratégie russe a progressivement changé dans le temps : dans un premier temps, la Russie avait décidé de ne pas comparaître devant les tribunaux et s’était limitée à envoyer des lettres de protestation à la CPA, puis elle a commencé à changer de tactique à compter de mai 2019, le ministre Konovalov ayant informé que la Russie allait s’engager dans une bataille juridique dès les premières phases des arbitrages. Ce changement a porté ces fruits : la Russie a emporté des victoires notamment relativement au rejet de la pertinence d’une security for costs75, et les sentences dans les affaires Naftogaz et Oshchadbank ont été annulées respectivement par la Cour d’appel de La Haye76 et par la Cour d’appel de Paris77 en raison de la non-applicabilité ratione temporis du TBI (notamment aux investissements effectués avant 1992).

La question de droit international public qui était au cœur du contentieux préliminaire dans ces affaires portait sur l’applicabilité du TBI Ukraine-Russie de 1998 pour engager la responsabilité de la Russie relativement à des faits qui se sont produits sur le territoire de Crimée à la suite de son annexion. Il a été souligné à quel point la structure du contentieux mixte en matière d’investissement constitue un prisme biaisé pour analyser cette question : les investisseurs ukrainiens veulent obtenir réparation et sont prêts à plaider que le territoire de Crimée fait désormais partie du territoire russe, tout comme la Russie peut avoir un intérêt à faire reconnaître sa souveraineté sur ce territoire par une juridiction internationale, quitte à accepter les conséquences en termes de réparation ; ce qui met l’Ukraine dans une situation stratégique compliquée78.

La plupart des tribunaux ont retenu leur compétence, mais leurs sentences ne sont pas publiques. En revanche, en lisant le contentieux de l’annulation devant le tribunal fédéral suisse, on apprend que les arbitres se sont basés sur une interprétation dynamique de la notion de « territoire » au sens de l’article 1(4) du TBI, notamment en application de la « moving treaty frontiers rule ». La Russie, en revanche, soutenait une notion statique du territoire, qui devait être figée au périmètre entendu au moment de la conclusion du traité. Selon elle, la prise en compte des évolutions ultérieures des frontières présuppose un accord ultérieur des parties. Le Tribunal fédéral n’est pas convaincu par la thèse russe, qu’il considère non étayée par des éléments probatoires suffisants79. Cette posture des tribunaux a été critiquée en doctrine, car se déclarer compétent par ce type de raisonnement reviendrait à méconnaître l’obligation de non-reconnaissance des situations constituées en violation de la prohibition du recours à la force, en soutenant que d’autres solutions juridiques auraient dû être envisagées80, thèse qui fait débat81.

Mais, enfin, il ne manque pas d’affaires lancées (ou que l’on menace de lancer) à l’encontre d’une Ukraine ébranlée par la guerre. Une procédure a été lancée sous les auspices de la Chambre de commerce de Stockholm par l’oligarque ukrainien Dmytro Firtash sur le fondement du Traité sur la Charte de l’énergie au début de 2022. De même, l’investisseur autrichien AMIC Energy a menacé de lancer ce même type de procédure, se heurtant aux contestations des autorités ukrainiennes qui considèrent qu’il s’agit en réalité de citoyens russes instrumentalisant les structures juridiques en place82, ce qui doit être sanctionné par l’activation de la clause de denial of benefits83. Cela montre à quel point le contentieux de l’investissement peut être actionné pour défendre des intérêts particuliers, y compris dans un contexte de guerre due à une annexion illicite.

Ce tour d’horizon a montré les liens complexes existant entre le droit international des investissements et la guerre. À un moment où l’arbitrage d’investissement est frappé par une crise de légitimité sans pareille, il semble important de prendre au sérieux les théories critiques du droit international et problématiser ce lien génétique ainsi que son impact sur la manière dont l’arbitrage d’investissement construit sa vision du monde.


1 J. Zrilič, The protection of foreign investment in times of armed conflicts, OUP, 2019 ; C. Schreuer, « The protection of investments in armed conflicts », in F. Baetens (dir.), Investment Law within International Law, CUP, 2013, p. 3-20 ; T. Ackermann, The effects of armed conflict on investment treaties, CUP, 2022.

2 « L’armée qui occupe un territoire ne pourra saisir que le numéraire, les fonds et les valeurs exigibles appartenant en propre à l’État, les dépôts d’armes, moyens de transport, magasins et approvisionnements et, en général, toute propriété mobilière de l’État de nature à servir aux opérations de la guerre ».

3 « Private property, unless forfeited by crimes or by offenses of the owner, can be seized only by way of military necessity, for the support or other benefit of the army or of the United States. If the owner has not fled, the commanding officer will cause receipts to be given, which may serve the spoliated owner to obtain indemnity ».

4 K. Greenman, State Responsibility and Rebels: The History and Legacy of Protecting Investment Against Revolution, CUP, 2021; D. Davitti, Investment and human rights in armed conflict: charting an elusive intersection, Bloomsbury, 2019.

5 K. Miles, The Origins of International Investment Law – Empire, Environments and the Safeguarding of Capital, Cambridge, CUP, 2013, xxvi-464 p.

6 K. J. Vandevelde, « A Brief History of International Investment Agreements », U.C. Davis Journal of International Law & Policy, vol. 12(1), 2005, p. 157-194.

7 J. T. Gathii, « War’s Legacy in International Investment Law », Int’l Comm. L. Rev., vol. 11, 2009, p. 353.

8 L. M. Drago, H. E. Nettles, « The Drago Doctrine in International Law and Politics », Hisp. Am. Hist. Rev., vol. 8, 1928, p. 204.

9 L. M. Drago, « State Loans in their Relation to International Policy », AJIL, 1907, p. 692-726.

10 M.R. Garcia-Mora, « The Calvo Clause in Latin American Constitutions and International Law », Marq. L. Rev., 1950, p. 205-206.

11 K. Greenman, State Responsibility and Rebels: The History and Legacy of Protecting Investment Against Revolution, Cambridge University Press, 2021, 288 p.

12 K. Greenman, op. cit., voy. chapitre 2.

13 K. Greenman, op. cit., p. 71-74.

14 K. Greenman, op. cit., p. 71.

15 K. Greenman, op. cit., p. 103-105.

16 J. T. Gathii, « War’s Legacy in International Investment Law », International Community Law Review, vol. 11.4, 2009, p. 353-386, p. 358.

17 Asian Agricultural Products Ltd. c. République du Sri Lanka, affaire CIRDI n. ARB/87/3, sentence du 27 juin 1990, voy. notamment les para 73-76 épluchant cette pratique.

18 Puisque l’arbitrage est normalement fondé sur l’accord des parties, il repose traditionnellement sur un contrat formalisant cet accord (dans la terminologie juridique anglo-saxonne, c’est l’idée de privity). La faculté pour l’investisseur d’invoquer un TBI conclu par son État de nationalité avec l’État d’accueil afin de lance une procédure arbitrale ouvre les possibilités de contentieux bien au-delà des cas d’arbitrage traditionnels, notamment en posant la fiction juridique d’une acceptation préalable de la part de l’État de ce type de contentieux par la clause de règlement des différends du TBI, donc without privity.

19 AAPL c. Sri Lanka, para 65.

20 AAPL c. Sri Lanka, para 26.

21 AAPL c. Sri Lanka, para 73.

22 AAPL c. Sri Lanka, para 85(a).

23 AAPL c. Sri Lanka, para 85(b).

24 J. T. Gathii, op. cit., p. 376

25 CIJ, Activités armées sur le territoire du Congo (République démocratique du Congo c. Ouganda), arrêt du 19 décembre 2005, para 304.

26 G. Foster, « Recovering “Protection and Security”: The Treaty Standard’s Obscure Origins, Forgotten Meaning, and Key Current Significance », VJTL, vol. 45, 2012, p. 1095.

27 K. Vandevelde, Bilateral Investment Treaties: History, Policy, and Interpretation, OUP, 2010, p. 244.

28 Commission mixte Italie-Venezuela, affaire Sambiaggio, 13 février et 7 mai 1903, RIAA, vol X, p. 499 où l’article 4 du traité Italie-Venezuela de 1861 prévoyait l’obligation de prévoir « the fullest measure of protection and security of person and property ».

29 CIJ, Affaire de l’Elettronica Sicula S.p.A. (ELSI), arrêt du 20 juillet 1989, CIJ Recueil 1989, p. 15.

30 Article V(1), reproduit au para 103 de l’arrêt.

31 CIJ, ELSI, arrêt du 20 juillet 1989, para 105.

32 CIJ, ELSI, arrêt du 20 juillet 1989, para 108.

33 G. Hernandez, « The interaction between investment law and the law of armed conflict in the interpretation of full protection and security clauses », in F. Baetens (dir.), Investment Law within International Law, CUP, 2013, p. 21-50, notamment p. 40-42.

34 CIJ, ELSI, arrêt du 20 juillet 1989, para 111.

35 Biwater Gauff c. Tanzanie, affaire CIRDI n. ARB/05/22, sentence du 24 julliet 2008, para 730.

36 Wena Hotels Ltd c. République arabe d’Egypte, aff. CIRDI n. ARB/98/4, sentence du 8 décembre 2000, para 84.

37 AMT c. Zaire, aff. CIRDI n. ARB/93/1, sentence du 21 février 1997, para 6.08.

38 C. Schreuer, « The protection of investments in armed conflicts », in F. Baetens (dir.), Investment Law within International Law, CUP, 2013, p. 8.

39 AES Summit Generation Ltd c. République de Hongrie, affaire CIRDI n. ARB/ 07/ 22, sentence du 2 septembre 2010, para 13.3.2 ; Biwater Gauff c. Tanzanie, affaire CIRDI n. ARB/05/22, sentence du 24 juillet 2008, para. 729.

40 Suez c. République d’Argentine, affaire CIRDI n. ARB/ 03/ 17, décision sur la responsabilité du 30 juillet 2010, para 173.

41 L. Déroche, « War Clauses in International Investment Law: A Need for Clarity », McGill J. Disp. Resol., vol. 7, 2020, p. 34.

42 C. Schreuer, « The protection of investments in armed conflicts », op. cit., p. 12.

43 CMS c. République d’Argentine, aff. CIRDI n. ARB/01/08, sentence 12 mai 2005, para. 375.

44 Treaty between the United States of America and the Republic of Zaire concerning the Reciprocal Encouragement and Protection of Investment, 3 août 1984, article IV(2).

45 AMT c. Zaïre, aff. CIRDI n. ARB/93/1, sentence du 21 février 1997, para 7.08-9.

46 O. Barsalou, « Making Humanitarian Law in the Cold: The Cold War, the United State and the Genesis of the Geneva Conventions of 1949 », IILJ Emerging Scholars Paper, 2008, p. 11.

47 J. Zrilič, op. cit., p. 134-135.

48 W. Burke-White, A. von Staden, « Investment Protection in Extraordinary Times: The Interpretation and Application of Non- Precluded Measures Provisions in Bilateral Investment Treaties », Va J Intl L, vol. 48(2), 2008, p. 308.

49 CMS c. République d’Argentine, aff. CIRDI n. ARB/01/08, décision sur l’annulation, 25 septembre 2007, para 146.

50 C. Schreuer, op. cit., p. 17.

51 Spanish Zone of Morocco Claim, 1924, RIAA, p. 615 ; Pinson c. États-Unis du Mexique, 1928, RIAA, p. 327.

52 Autopista Concesionada c. Venezuela, aff. CIRDI n. ARB/00/5, sentence 23 September 2003, para 106-109.

53 C. Chinkin, « Crisis and the Performance of International Agreements: The Outbreak of War in Perspective », Yale J World Pub Ord., vol. 7, 1981,194.

54 C. Hurst, « The Effect of War on Treaties », BYIL, vol. 2, 1921, p. 37-39.

55 C. Chinkin, op. cit., p. 192-93.

56 CDI, Projet d’articles sur les effets des conflits armés sur les traités, 2011, A/66/10.

57 CDI, Projet d’articles sur les effets des conflits armés sur les traités, 2011, A/66/10, p. 220-221, para 48 : « La mention de la catégorie des traités visant à protéger les droits de l’homme peut être considérée comme une extension naturelle du statut accordé aux traités d’amitié, de commerce et de navigation et aux accords analogues concernant des droits privés, notamment les traités bilatéraux relatifs aux investissements ».

58 J. Zrilič, op. cit., p. 63-64.

59 C. Schreuer, op. cit., p. 5 ; G. Hernandez, op. cit., p. 31.

60 N. Gerhardstein, « Accélérer les investissements pour reconstruire l’Ukraine », Paperjam, 9 janvier 2023.

61 C. Giorgetti, M. Kliuchkovsky, P. Pearsall, « Launching an International Claims Commission for Ukraine », 20 mai 2022, Just Security.

62 D. Davitti, op. cit., p. 47.

63 King & Spalding’s Client Alert, « Crisis in Libya: What Legal Options are Available to Oil and Gas Companies ? », 17 May 2011, p. 3-4; Freshfields Bruckhaus Deringer, « Investments in Libya: potential claims under bilateral investment treaties and political risk insurance policies », Briefing of 10 March 2011.

64 Herbert Smith Freehills, « Inside Arbitration : The War in Ukraine – Implications for Investments and Contracts », 11 juillet 2022 ; Linklaters, « Investment protection in challenging times », 4 juillet 2022 ; Simmons + Simmons, « The war in Ukraine: Seeking redress through investment treaty claims », 28 June 2022.

65 M. Sassòli, « Foreword: The Role of International Investment Law in Conflict Scenarios», in T. Ackermann, S. Wuschka (dir.), Investments in Conflict Zones, Brill, 2020, p. xiv.

66 PCA Case No. 2015-07, Aeroport Belbek LLC and Mr. Igor Valerievich Kolomoisky v. the Russian Federation.

67 PCA Case No. 2015-21, PJSC CB PrivatBank and Finance Company Finilon LLC v. the Russian Federation. 

68 PCA Case No. 2015-34, PJSC Ukrnafta v. the Russian Federation.

69 PCA Case No. 2015-35, Stabil LLC et al. v. the Russian Federation.

70 PCA Case No. 2015-29, Lugzor LLC et al. v. the Russian Federation. 

71 PCA Case No. 2015-36, Everest Estate LLC et al. v. the Russian Federation.

72 PCA Case No. 2016-14, Oschadbank v. the Russian Federation. 

73 PCA Case No. 2017-16, NJSC Naftogaz of Ukraine et al. v. the Russian Federation.

74 Peu d’informations sont pour l’heure disponibles.

75 Voy. l’affaire Lugzor.

76 Cour d’appel de La Haye, arrêt du 19 juillet 2022.

77 Cour d’appel de Paris, arrêt du 30 mars 2021.

78 P. Tzeng, « Sovereignty over Crimea: A case for State-to-State Investment Arbitration », Yale Journal of International Law, vol. 41, 2016, p. 460.

79 Tribunal fédéral, arrêt du 16 octobre 2018, 144 III 559, para 4.3.2.

80 F. Krumbiegel, « The Applicability of the Russia-Ukraine Bilateral Investment Treaty to Crimea in the Light of the Duty of Non-Recognition in International Law », Journal of International Arbitration, vol. 38(5), 2021, p. 645-670.

81 M. Sassòli, « Foreword: The Role of International Investment Law in Conflict Scenarios», in T. Ackermann, S. Wuschka (dir.), Investments in Conflict Zones, Brill, 2020, p. xv: « the concept of effective control under investment protection treaties, ihrl and ihl must be understood in light of the realities on the ground. This, therefore, cannot imply a violation of the duty of non-recognition ».

82 J. García Olmedo, L. Gradoni, « A Little Threat from My Friends: An EU-based Company Contemplates Taking War-Torn Ukraine to Investment Arbitration », EJIL:Talk, 7 novembre 2022.

83 La denial of benefits clause permet à l’État partie au traité de nier les bénéfices du TBI aux personnes morales ayant la nationalité de l’autre partie contractante, dans certaines circonstances, afin de contrebalancer les risques d’une définition trop large de la notion d’investisseur (voy. P.-J. Le Cannu, L. Torres, « Denial of Benefits Clause », in H. Ruiz Fabri, E. Stoppioni, International Investment Law – An Analysis of Major Decisions, Hart, 2022, p. 398).


Edoardo Stoppioni, « Le droit des investissements à l’épreuve de la guerre », Le retour de la guerre [Dossier], Confluence des droits_La revue [En ligne], 12 | 2023, mis en ligne le 17 décembre 2023. URL : https://confluencedesdroits-larevue.com/?p=2477.

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